L’EXIL, LA NOSTALGIE, LE RETOUR
Le printemps est de retour. Ça donne le goût de revenir au premier pas de la vie. Avez-vous remarqué comment les yeux des enfants sont purs, complètement ouverts et présents avant que leur ego n’entame sa construction. Pour l’enfant, tout est magique, le monde, les autres, car il est spontanément présent à toute la merveille infinie de la vie. Il vit dans un monde d’anges et de fées partout dans l’univers. Et vous êtes-vous demandé après cela comment il se fait que le temps nous transforme en ego avec la prise de conscience de la limite du corps qui nous fait différent des autres. Alors commence un autre regard sur soi: celui que l’on lit dans le regard des autres. On veut épater, trouver l’amour, la reconnaissance dans le regard de l’autre. On s’efforce à être meilleur, extraordinaire, unique pour que se manifeste l’approbation de l’autre, ses applaudissements et ses expressions de joie. Pendant tout un bout de vie, toute la vie parfois, on ajoute à cette édification de son ego: des biens, des réussites, des diplômes, des possessions, une autobiographie, un site web, etc… Il y a en nous comme une peur de ne pas être assez, assez aimé, assez reconnu, assez en sécurité. Car tout ce temps, il y a en nous comme un vide à combler et que tout ce qui vient de l’extérieur ne parvient pas à remplir. Alors on se sent inaccompli. Il nous manque sans cesse quelque chose d’important, malgré les plus grandes réussites sociales et les plus grands succès financiers. On souffre parce qu’on ne sait pas de quoi il s’agit. En fait, c’est qu’on a quitté depuis longtemps son enfance, son enfant intérieur qui lui est toujours là. Lui qui vivait l’unité parfaite avec l’univers. Cet enfant est toujours là et fait que l’on éprouve une profonde nostalgie. C’est lui qui nous rappelle sans cesse que le monde était si magique au départ, heureux et complet quand nous étions petits, alors que nous avions l’impression d’être tout sans pourtant rien avoir. La vie nous a exilé de notre présence d’enfant si merveilleuse, si magique, si pleine et transparente. Malgré nos plus belles performances en tant qu’ego, nous nous sentons vides et nostalgiques quand la fin de semaine ou les vacances arrivent. Certains ont besoin de divers artifices pour ne plus sentir ce vertige: alcool, médicaments, travail, jeu, etc…Jusqu’au jour où cette vie en exil à l’extérieur de soi, derrière nos carapaces, protégé derrière nos boucliers, finisse par nous faire étouffer de nostalgie. Empreint d’un profond vertige, chacun à sa façon, nous crions alors à l’aide si nous avons de la chance. Et là quelqu’un ou quelque chose nous retourne le regard à l’intérieur où se trouve toujours cet enfant oublié que nous avons pourtant déjà été. C’est notre conscience, notre pleine présence. Notre ego peut alors éclater en morceau pour faire place à cette conscience, le Je, la source du regard. C’est l’histoire de l’enfant prodigue que l’on retrouve dans toute les religions et spiritualités du monde. Toutes, en effet, enseigne la conversion du regard et nous disent de nous retourner vers la source de la Présence, toujours la même, là depuis que nous sommes venus au monde. En renaissant dans la présence du moment nous retrouvons notre âme, vide comme un néant, mais ouverte à tout ce qui est et qui nous comble de bonheur par son unité, son éternité et sa communion à tout ce qui est. Nous découvrons que nous avons toujours été toutes les choses. Que nous sommes la vie de l’univers consciente d’elle-même à travers nous. Que nous sommes ce Dieu qui s’amusait jadis quand nous étions alors enfant et sans limitations.